En levant certaines barrières juridiques, la loi Alur de 2014 crée, en théorie, un cadre réglementaire plus favorable aux projets collectifs ou individuels visant à agrandir la surface habitable à partir de la toiture d’un immeuble géré en copropriété.
Dans les métropoles dites « en tension », où le foncier disponible manque pour engager de vastes programmes immobiliers, la surélévation d’immeuble apparaît, sur le papier, comme une option moins coûteuse que la démolition-construction pour répondre à la pénurie de logements par l’ajout d’un ou plusieurs étages aux ensembles existants. Ce type de chantier, très courant dans les villes jusqu’à la veille de la deuxième guerre mondiale, a ensuite fortement ralenti avec l’arrivée des plans d’urbanisme définis au niveau communal et intercommunal, complétés par la généralisation de règles de densité établies par les coefficients d’occupation des sols (COS). Autant d’obstacles que la Loi pour l’Accès au Logement et Urbanisme Rénové (Alur) s’est employé à lever pour encourager les extensions verticales et relancer la construction de logements: Aussi le COS, qui déterminait la surface constructible sur une parcelle foncière, a-t-il été supprimé afin de faciliter le redémarrage d’un processus de densification du bâti dans les zones en tension.
Vote plus ouvert en assemblée générale de copropriété
Cette mesure s’inscrivait dans une logique d’assouplissement amorcée dès 2009 avec la modification des règles de vote en assemblée générale de copropriété (Loi Boutin) : depuis cette date, la majorité absolue, moins restrictive que la double-majorité anciennement requise (deux-tiers des voix), suffit pour valider la vente d’un ou plusieurs droits de surélévation, à condition que l’immeuble concerné soit situé dans un périmètre couvert par un droit de préemption urbain (DPU) : cette procédure, qui permet notamment aux pouvoir publics locaux d’acquérir en priorité un bien immobilier mis en vente, s’applique en général dans les centres-villes, là où la pression foncière est la plus forte.
Si les règles de gabarits - qui fixent une hauteur maximale pour les constructions - ont été maintenues, certaines dispositions légales introduites par l’ordonnance du 3 octobre 2013 permettent de les contourner partiellement grâce à un système de dérogation au PLU (plan local d’urbanisme), sous réserve que le projet s’intègre de façon harmonieuse dans le milieu environnant et - dans un même souci d’alignement - ne dépasse pas la hauteur des bâtiments contigus.
Pour les copropriétés hors DPU, la surélévation se décide, depuis la loi Alur, à la double-majorité (article 26 de la loi du 10 juillet 1965), et non plus à l’unanimité. A cette simplification juridique s’ajoute la disparition du droit de veto dont jouissaient jusqu’alors les occupants du dernier étage pour s’opposer à un projet d’extension depuis la toiture : en contrepartie, la loi les dote d’un nouveau droit prioritaire d’acquisition sur les lots privatifs créés à l’occasion de ce programme de construction.
Surélever pour réduire les coûts ?
Dans l’immense majorité des cas, les syndics à l’initiative de l’opération s’adressent, pour des raisons pratiques, à un promoteur qui prend en charge l’ensemble du chantier : c’est à ce professionnel qu’est vendu le droit à construire (une fois approuvé par l’assemblée générale). A lui également que reviendra la tâche de commercialiser les logements neufs. Le montant de la transaction est ensuite réparti entre chaque propriétaire à hauteur de leur niveau de participation dans la copropriété.
Rien n’empêche le syndic d’être le maître d’ouvrage des travaux. Mais un tel choix implique des contraintes administratives et financières : une société civile de construction-vente est à constituer et une assurance dommages-ouvrage doit être souscrite pendant dix ans au titre de la responsabilité décennale obligatoire dans le secteur du BTP. Sans compter qu’il faut contacter un emprunt auprès de la banque, investir éventuellement des fonds propres dans le projet de surélévation et être en mesure de présenter une garantie extrinsèque d’achèvement.
La construction de nouvelles surfaces habitables au sein d’une copropriété présente au moins deux avantages : à court terme, la vente du droit à construire à un promoteur (ou aux propriétaires du dernier étage s’ils usent de leur droit prioritaire) apporte au syndic de l’argent frais réutilisable immédiatement dans un programme de financement d’autres travaux (ravalement de façade, rénovation thermique, installation d’un ascenseur…). A plus longue échéance, l’augmentation du nombre de lots permet d’optimiser la répartition des charges de l’immeuble et donc de réduire les frais de gestion facturés à chacun des copropriétaires.