Les syndics d’immeuble ont désormais la possibilité légale d’organiser, sans vote préalable, des assemblées générales en visio-conférence ou par téléphone. A cette mesure d’ordre sanitaire, s’ajoute une réforme globale du droit des copropriétés visant à simplifier les prises de décision.
L’irruption brutale de l’épidémie de Covid-19, qui a nécessité un confinement quasi général de la population entre le 15 mars et le 11 mai, a bousculé de nombreuses règles juridiques, devenues brusquement incompatibles avec le respect impérieux de consignes sanitaires strictes, jamais appliquées jusqu’alors : la distances de sécurité entre les individus, l’interdiction des rassemblements trop nombreux, les restrictions de déplacements et l’application de gestes barrières ont rendu, sinon impossible, du moins très compliquée la tenue physiques d’instances de décision indispensables au fonctionnement d’entités collectives, comme les syndics et les assemblées générales de copropriétaires, organes délibératifs et gestionnaires de nombreux immeubles (entre 8 et 10 millions de logements relèvent de ce statut, soit près du quart du parc français).
AG dématérialisée et vote par correspondance
Au plus fort du confinement et de la crise pandémique, il était légal d’y organiser des réunions au moyen de solutions alternatives permettant des entrevues à distance et/ou par écrans interposés, telle que la visioconférence. Cette mesure était spécifiquement mentionnée dans l’ordonnance du 25 mars 2020 qui faisait suite à l’adoption, deux jours plus tôt, de la loi instaurant un Etat d’urgence sanitaire (jusqu’au 10 juillet 2020). Elle avait été complétée par une disposition qui reconduisait automatiquement les mandats des membres des syndics (et conseils) dont l’échéance tombait pendant la période de confinement. Objectif de l’opération : faire en sorte que, dans l’intervalle, aucune copropriété ne se retrouve sans administrateur, faute d’avoir pu consulter les parties prenantes et organiser d’élection en bonne et due forme.
La possibilité offerte aux syndics d’organiser une AG dématérialisée ne date pourtant pas des contraintes imposées par la gestion du Covid-19 : la loi Elan (sur l’Evolution du Logement, de l’Aménagement et du Numérique) en a introduit le principe dès 2018 dans un chapitre tout entier consacré à l’amélioration du droit des copropriétés (Titre IV, chapitre V), un texte qui formalisait aussi l’autorisation de recourir au vote par correspondance. Mais la mise en œuvre de ces nouvelles règles étaient soumises à plusieurs conditions, celle notamment d’en référer à l’assemblée générale et de faire valider par ses suffrages les modalités du dispositif technique à mettre en place pour réaliser une vidéo ou une audioconférence (en théorie, l’examen devait se faire sur la base des devis relatifs à l’achat des équipements à installer).
C’est ce cadre normatif qui vient d’être assoupli par une autre ordonnance, promulguée au journal officiel le 21 mai 2020. Que prévoit-elle ?
Depuis le 1er juin et jusqu’au 31 janvier 2021, tout syndic de copropriété est habilité à convoquer une assemblée générale en visioconférence (ou par tout autre moyen dématérialisé) sans l’approbation préalable de l’assemblée générale : il n’est donc plus besoin d’organiser un vote au sein de l’immeuble pour en valider le dispositif.
Si cette réunion à distance n’est pas possible, la loi autorise le syndic à maintenir le processus de décision et, pour ce faire, à signifier aux membres de la copropriété qu’il donnera lieu à l’organisation d’un vote par correspondance (un modèle de formulaire de vote devra être fourni à chaque participant).
Troisième mesure forte : la nouvelle loi renforce la capacité de représentation des mandataires qui reçoivent d’un ou de plusieurs copropriétaires absents le pouvoir de voter en leur nom. Chacun d’eux peut désormais cumuler plus de trois délégations si la part totale des voix dont il dispose – en plus des siennes - ne dépasse pas 15% (ce seuil était à 10% auparavant).
Le droit des copropriétés simplifié
Enfin, et c’est loin d’être un hasard du calendrier, l’ordonnance du 21 mai 2020 s’articule avec une réforme globale du droit des copropriétés, elle aussi entrée en vigueur le 1er juin dernier.
Elle allège notamment les obligations comptables des petites copropriétés de moins de 5 lots et/ou qui gèrent un budget inférieur à 15 000 euros sur trois ans : le texte ne leur impose plus l’enregistrement systématique des créances et des dettes (non encore réglées). Elles sont donc autorisées à ne signaler sur leurs livres de compte que les opérations de trésorerie, à savoir les dépenses effectivement payées et les recettes encaissées.
L’un des principes de la réforme vise à éviter les blocages dans les prises de décision et faciliter la gouvernance des copropriétés : c’est dans cette logique que les règles de vote en assemblée générale ont, une fois encore, été assouplies. Un exemple : un projet de travaux qui ne recueille pas la majorité absolue (en raison d’un fort absentéisme lors de la consultation), ne sera pas forcément annulé ou retardé. S’il a obtenu au moins un tiers des voix, un second vote peut être organisé sur la base d’un mode de scrutin moins restrictif que le précédent (sera exigible la seule majorité des voix exprimées par les copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance).
Dernier point : depuis le 1er juin, l’assemblée générale des copropriétaires a la possibilité de déléguer des missions au conseil syndical, organe consultatif, d’assistance et de contrôle du syndic. Ces nouvelles prérogatives portent sur la réalisation de certains travaux mentionnés à l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965. Les décisions les plus importantes, comme l’approbation des comptes et la fixation du budget prévisionnel, ne sont pas concernées et doivent toujours faire l’objet d’un examen par les copropriétaires.
Date de mise à jour : 14/09/23
Date de création : 15/06/20